5ième et dernier dimanche de carême! le 13 mars 2016
Adultère… La Loi de l'ancien testament est connue : "Tu ne commettras pas d'adultère !" ( Ex 20.14) L'article 212 du code civil dit que « Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance ». La fidélité demeure une obligation civile, les juges apprécient la gravité de la faute commise et ses conséquences. Est adultère (dans son origine) ce qui est altéré et mélangé. Ce récit dit de la femme adultère porte bien son nom… Il y a des choses falsifiées et mêlées, il y a des manques…
Première altération : l'adultère nécessite d'être deux : nous voyons bien la femme surprise en flagrant délit, mais où est passé l'homme qui au terme de la loi "doit mourir lui et sa complice." Nous dit le Lv. 20.10... un livre qui a pris forme au V° siècle a.J.C.
Pour nous ici s'ouvre ici le piège de l'anachronisme qui consisterait à faire de jésus le militant des revendications féministes. Nous sentirons comment la fin de ce passage envisage les choses autrement!
Revenons à Jésus qui est à Jérusalem, au temple ce qui est pour lui toujours tendu !
Il reste fidèle à lui même: il rassemble autour de lui ! Il nous a habitués à se tenir solidement debout pour enseigner… au centre de ceux qui sont assis en cercle autour de lui.
Ici le cercle des enseignés est brisé par l'arrivée intempestive des pharisiens qui jettent, par terre, au milieu du cercle, aux yeux de tous une femme surprise en flagrant délit d'adultère !
Quelle insulte quel cynisme, de la part de ses hommes du temple, imbus d'autoritarisme de rejeter Jésus du centre de la scène pour le remplacer par une pécheresse !
Alors se dessine un étrange balai : se tenant debout en entendant la question vicieuse des scribes
Jésus finit par se baisser jusqu'à terre comme unique réponse ? Le silence est pesant !
Ce silence est nécessaire pour comprendre que jésus se met niveau de la femme, blessée de la double peine : car il n'y a pas place pour une présomption d'innocence elle est jugée, elle est écrasée par la faute commise et par l'odieuse domination humiliante qui lui hôte toute humanité!
Jésus et la femme sont maintenant au centre, aux yeux de tous, mais solidaire, proche d'une étonnante proximité!
Hier Maryse Mérieux aumônier à la prison d'Aiton était avec nous à l'aumônerie scolaire ... Son message de passion qu'elle nous a délivrée c'est son émerveillement et sa revendication devant la dignité de la personne humaine : on peut priver quelqu'un de sa liberté mais l'évangile ne tolère pas que l'on ôte la fibre d'humanité qui fait l'homme même coupable !
Alors à l'insistance de ses provocateurs Jésus se relève à nouveau pour inviter les trop-sûrs-d'eux-mêmes, les purs à jeter la première pierre selon la Loi !
Et se baissant à nouveau en silence traçant avec son doigt des traits sur le sol ?
Le silence est encore plus pesant !
Il faut du temps pour comprendre que Jésus se fait tout miséricordieux, non seulement il se met à la hauteur de la pécheresse, mais il prend le risque de subir la même peine qu'elle; la même angoisse à se demander quand la première pierre va être jetée, déclenchant la violente et mortelle cascade ! Il est inutile de rappeler l'horreur du supplice des pierres qui tuent ... mais qui n'a pas lieu !Reste au bout du compte quelques pierres abandonnées par terre; et ce tête à tête, sublime de Jésus avec la femme; tout d'eux debout au milieu du monde !
C'est là que nous réalisons qu'il est heureux que l'homme avec qui cette femme avait péché ne fut pas présent; il aurait empêché ce face à face sublime, intime, qui fait se croisé deux regards, qui fait deux cœurs aimer d'un même amour; en ce cas le cœur d'une femme n'est-il pas plus apte que celui de l'homme ?Alors je sais que certains regrettent l'absence de l'homme, car cela aurait pu faire la leçon sur le bienfondé du mariage, ou mettre à égalité homme et femme... Mais Jésus ne vise pas l'institution, ni la morale, il touche le cœur aimant et aimable ! C'est ainsi: la conversion personnelle, intime, unit un être avec son Dieu !
Ce tête à tête, sublime de Jésus avec la femme naît du cercle vicieux qui disparaît et du
cercle initial des enseignés qui s'estompe en s'agrandissant aux dimensions du monde !Nous voici dans la mémoire du face à face de Dieu avec l'Homme comme à l'origine. Dieu et l'homme ( ish et isha, homme et femme) : Dieu dit et ce qu'il dit advient.
Nous sommes invités à nous souvenir du baiser primordial de Dieu et de l'Humain !
Alors si nous revenons sur les silences de Jésus dans cette histoire nous serons attentifs à voir comment Jésus disparaît derrière son doigt qu'il pointe vers le sol…
Et qu' est-il en train d'écrire ?
Ce qu'il est en train d'écrire demeure un mystère car les traits dans le sable sont à tout jamais balayés, effacés par le vent. La parole est accomplie…
Lui la Parole sans mots, sans lettres montre du doigt, désigne et indique une voie. Une mystérieuse voie. Un ailleurs …
C'est un jeune de 12 ans qui un jour m'a dit : " Mais moi je sais ce qu'il écrit Jésus : il écrit la nouvelle loi d'amour !"
Oui j'ai lu et relu cette histoire, avec la clef que ce jeune inspiré m'a livrée. Et c'est vrai cela tient la route…
Les cercles qui se brisent libèrent des habitudes, et de la loi.
Ils laissent échapper la parole au-delà du cercle des initiés…
La parole rejoint l'homme absent…
La loi ancienne, celle d'hier, est du passé, et dépassée;
la loi nouvelle, pour aujourd'hui, ouvre un avenir.
La loi ancienne porte la peine de mort,
la Loi nouvelle osée dans la fragilité de la poussière du sol porte la peine de vie : comme à l'heure primordiale où le doigt de Dieu dessine de la terre une forme d'homme. La vie, ça vaut la peine, la vie est devant : alors " Va et ne pèche plus !"
En parlant ainsi, Jésus mise sur la personne au détriment de l'institution. La lettre, la sécheresse du commandement fait place à l'exigence d'aimer de donner et de pardonner. La rigueur et la froideur de la loi devient parole de tendresse et regard profond. Ce regard s'enfonce dans le cœur des détracteurs, des adversaires qui dénigrent et provoquent… qui vont finir par toucher le fond d'eux-mêmes : ils partent tous les uns après les autres.L'Amour est joué contre la loi.
Comme texte du 5ième dimanche de carême c'est l'apothéose !
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 8, 1-11)
Alors que Jésus s’en alla au mont des Oliviers.
Dès l’aurore, il retourna au Temple.
Comme tout le peuple venait à lui,
il s’assit et se mit à enseigner.
Les scribes et les pharisiens lui amènent une femme
qu’on avait surprise en situation d’adultère.
Ils la mettent au milieu,et disent à Jésus :
« Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère.
Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là.
Et toi, que dis-tu ? »
Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve,afin de pouvoir l’accuser.
Mais Jésus s’était baissé et, du doigt, il écrivait sur la terre.
Silence !
Comme on persistait à l’interroger,il se redressa et leur dit :« Celui d’entre vous qui est sans péché,qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
Il se baissa de nouveau et il écrivait sur la terre.
Silence !
Eux, après avoir entendu cela,s’en allaient un par un,en commençant par les plus âgés.
Jésus resta seul avec la femme toujours là au milieu.
Il se redressa et lui demanda : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » Elle répondit :
« Personne, Seigneur. » Et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »
Dimanche 13 Mars 2016